La révolution iranienne peut-elle servir d’exemple?

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Écrit par / l’éminent professeur Mohamed Galaye Ndiaye- Bruxelles
Directeur de l’Institut Mihrab à Bruxelles.

La révolution iranienne peut-elle servir d’exemple ?

Le philosophe français René Descartes dit : « Il vaut mieux qu’une personne ne cherche pas la vérité si elle n’a pas de méthode. »

Le parti Pastef, à ce stade critique et difficile, a plus que jamais besoin d’une nouvelle et sage méthode pour affronter la dictature du gouvernement de Macky Sall. Cette méthode doit également s’accompagner d’une planification et d’une coordination qui se déroulent dans le plus grand secret afin que le parti – après l’arrestation du fer de lance, c’est-à-dire le leader Ousmane Sonko – puisse s’unir et rassembler ses démembrements dans un premier temps, et travailler sérieusement à mettre en place la stratégie qu’elle adoptera pour rendre la résistance plus intense et plus influente au niveau local et mondial dans un deuxième temps.
La dissolution du parti Pastef par le gouvernement n’a pour but, aux yeux des partisans du parti, que de chercher à changer les canaux de la résistance, et il y a une sagesse qui dit : « Chaque nouvelle situation impose un nouveau changement ». En d’autres termes, les conditions actuelles obligent les Pastéfiens à créer une nouvelle stratégie afin d’être au niveau des événements en termes de riposte et d’attaque efficace. Il ne fait aucun doute que le succès du gouvernement injuste de Macky Sall à emprisonner le chef de l’opposition Ousmane Sonko et à réduire l’intensité de la révolution qui a éclaté dans la soirée du vendredi 28 juillet 2023 après la nouvelle de l’arrestation du leader Sonko, repose sur deux points principaux :
Le premier : le bon moment, c’est à dire la fin des examens des lycéens, la fermeture des écoles et la plupart des étudiants quittant la capitale, Dakar, vers leurs régions d’origine, ce qui a sans aucun doute affecté l’intensité de la révolution et son arrêt.
Le second : La décision du gouvernement de bloquer l’accès à l’Internet a été décisive pour atténuer le dynamisme de la révolution, car les révolutionnaires n’avaient pas de coordination entre eux, leurs mouvements et leurs activités sur le terrain étant malheureusement devenus presque aléatoires.
De ce point de vue, nous pensons qu’il est urgent de changer de méthode et de stratégie afin que la prochaine manifestation soit efficace et fructueuse, voire fatale, menant au renversement définitif du dictateur et de son régime brutal. Pour cela, les éléments les plus en vue de Pastef doivent inévitablement quitter le pays au plus vite, car le gouvernement les poursuivra de toutes parts et par tous les moyens à sa disposition. Les Pastéfiens doivent également refuser de répondre à toute convocation de la gendarmerie ou de la police. C’est une guerre féroce qui est déclarée contre eux, et une guerre est gagnée par ceux qui sont les mieux préparés. Nous disons cela parce que cet Etat brutal ne sera jamais satisfait tant qu’il n’aura pas éradiqué les racines du parti, arrêté tous ses dirigeants et partisans influents, les aura emprisonnés ou mis un terme définitif à leur vie. Le gouvernement a toujours mis en place un plan infernal de meurtres, de répression, d’intimidation, d’emprisonnement et de torture. L’objectif ainsi visé est, en premier lieu, de faire avorter la révolution dans le cerveau de la jeunesse, et mettre, en second lieu, un terme définitif au parti Pastef. Par conséquent, il ne prend pas du tout en compte les droits des citoyens dans ses actions et ne se soucie guère de savoir s’il applique la loi correctement ! Il agit selon ses désirs et ses passions, en instrumentalisant la justice pour couvrir toutes ses attaques, violations et exactions commises contre les opposants. Bref, tout ce qui compte pour ce gouvernement est d’atteindre son objectif par tous les moyens et par toutes les manières possibles ! Même si ce qui est commis est scandaleusement abominable ! La fin justifie les moyens !
Si telle est la nouvelle façon de procéder du régime, à partir de maintenant il est impératif pour le parti de Pastef de changer son plan et son approche envers ses partisans d’une part, et ses ennemis d’autre part. Toutes les activités et tâches internes doivent être confiées aux gens de la diaspora, en particulier ceux qui résident en Occident, et ce, pour des raisons connues. L’Occident en général est plus sensible aux droits et à la dignité des êtres humains en termes de préservation et d’immunité, et est également plus désireux de soutenir la démocratie et la liberté d’expression. Désormais, le front de résistance doit venir de l’extérieur, et non de l’intérieur, sauf par nécessité.
Nous pouvons donc nous inspirer de l’histoire récente, notamment avec de Gaulle qui s’est exilé à Londres pour mieux faire face à l’occupant allemand et à ses alliés internes français. L’Ayatollah Ruhollah Khomeini a également dirigé la révolution islamique iranienne de son lieu d’exil en Irak et puis en France jusqu’à ce qu’elle réussisse et porte ses fruits.
Il est clair que de nombreuses expériences du passé nous enseignent que l’on ne combat pas les régimes dictatoriaux seulement de l’intérieur. Pour les renverser, il est important de mettre en place plusieurs fronts de résistance à l’extérieur, loin de leurs zones de contrôle et de domination, et en impliquant d’autres entités étrangères sensibles à la cause des peuples opprimés. Il convient de noter, sous un autre angle, que dans les circonstances difficiles actuelles, nul citoyen n’est à l’abri, quel que soit son statut et son poids dans la société, même s’il est du côté du pouvoir ! Car les régimes dictatoriaux, totalitaires et fascistes ne connaissent ni clémence ni compassion envers leur peuple. Ils agissent en fonction de leurs intérêts et de leurs désirs, et sont capables de sacrifier certains de leurs éléments s’ils le jugent nécessaire.
Il apparaît clairement que Macky Sall succombe à ses caprices et obéit à sa colère et à sa haine viscérale à l’endroit du leader Sonko et à ses partisans. Il a perdu toute raison et conscience attendues d’un président. Macky agit contrairement au dicton célèbre prononcé par l’empereur Napoléon Bonaparte : « Le cœur d’un homme d’État doit être dans sa tête ».
C’est dire l’importance de l’usage correct de la raison, de la pensée saine et de la prise de décision éclairée chez un homme d’État. C’est dire également l’importance de la prise de décisions politiques sages qui se départissent de la passion outrée et de l’humeur colérique.
Selon le mot de Che Guevara, « un droit qui n’est pas soutenu par une force qui le protège est considéré comme nul et non avenu dans le droit de la politique ». L’État a en effet cherché par son pouvoir, son influence et son intimidation, à ferrer de nombreux hommes religieux, institutions islamiques, personnalités des médias, hommes d’affaires, membres de la société civile et autres ! Une bonne partie composant cette frange de la société se met aujourd’hui à chanter les éloges du pouvoir ou à se taire sur ses dérives, par peur surtout d’un avenir incertain et/ou de perdre certains privilèges. De ce point de vue, on se rend compte que le Sénégal, sous le régime brutal de Macky Sall, n’est plus ce havre de paix qu’il était, mais a basculé dans la déchéance, devenant un enfer pour un grand nombre de ses citoyens.
Le Sénégal était autrefois célèbre parmi les pays du monde pour sa démocratie exemplaire et le pacifisme de son peuple, depuis son accession à l’indépendance en 1960. Ses présidents se sont succédé sans qu’aucun coût d’Etat militaire ne soit perpétré. Appartenir à ce glorieux pays était une question de fierté et d’honneur. À cela s’ajoute la grande renommée dont jouissent certaines de ses personnalités et cadres éclairés, qui se distinguent par leur sagesse, leur équilibre et leur vaste culture.
Nous terminons ce texte par le discours historique prononcé par le leader Ousmane Sonko lors d’une de ses sorties, un discours d’une grande importance surtout dans la situation de tension actuelle. Un discours qui doit résonner jour et nuit aux oreilles des militants conscients comme catalyseur, pour inciter le peuple, et les jeunes en particulier, à demeurer sur le chemin de la résistance et à faire fi des discours paralysants.
« Je m’adresse singulièrement à cette jeunesse, prise en étau, angoissée par un avenir sans horizon, minée par le chômage et la honte de ne pouvoir réaliser ses rêves, engloutie dans les océans ou le désert à la recherche désespérée d’un hypothétique paradis. À cette jeunesse, je rappelle ce qui nous lie, parce que tout le monde sait qu’il y a un lien particulier entre nous et la jeunesse. Ce qui nous lie, c’est l’idéal d’une société juste dont les richesses et les ressources seront partagées équitablement et où toutes les chances seront égales. O frères et sœurs Africains, l’heure de notre révolution a sonné. N’acceptons plus ces petits présidents comploteurs, toujours à la solde de quelqu’un mais jamais au service de leur peuple. Partout en Afrique doit souffler un vent nouveau de liberté, de démocratie et de souveraineté. Le 21e siècle doit être Africain et siffler le réveil du Phénix endormi depuis trop longtemps. » Président Ousmane Sonko.
Pr. Mohamed Galaye Ndiaye, théologien et philosophe.

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